Meet the makers : Aria Ann, architecte et designer indépendante
- Quel est ton profil de makeuse ? Artiste et makeuse depuis toujours ?
Oui, on peut dire que je suis makeuse depuis toujours, j’ai toujours été curieuse de savoir comment “les choses se font”, d’expérimenter à travers la création et surtout d’apprendre à “faire moi-même”. Je suis architecte de formation mais mes intérêts et passions m’ont conduit à devenir scénographe, designer et artiste.
Vouloir faire les choses par soi-même, c’est un élan contagieux qui touche beaucoup de gens, ce qui est super ! Ça permet de retrouver des plaisir manuels, d’élargir ses compétences et savoir-faire et de retrouver, d’une certaine manière, un genre d’authenticité. Je pense que, quelque part, nous sommes tous des makers et makeuses, potentiels ou affirmés.
- Comment as-tu commencé à venir utiliser un fablab, qu’est-ce qui t’a fait sauter le pas et t’a motivée ?
Tout a commencé en 2015 à Paris, quand j’ai participé à la création et mise en place de l’espace de coworking et Fablab VOLUMES, où j’étais chargée de la conception et fabrication du mobilier et du pôle design. Cette expérience m’a permis de découvrir des nouvelles manières de travailler, qu’on ne nous apprend pas forcément à l’université. Je voulais créer mon propre travail et je sentais qu’un tiers lieu peuplé d’indépendants et d’artisans issus de tout type d’univers nourrirait mon imagination.
Grâce à cette expérience, j’ai pu apprendre l’usage d’une machine laser mais surtout d’une fraiseuse numérique (CNC). Ça m’a permis de répondre à ma première commande de mobilier et de découvrir un vrai intérêt pour cette pratique d’ « artisan numérique » qui, aujourd’hui, caractérise une bonne partie de mon travail.
- Quels sont les avantages à venir utiliser un lieu comme le cityfab1 ?
Les fablabs permettent d’expérimenter ses idées, de créer des prototypes, de réaliser des séries limitées… En plus de cela, ils permettent d’apprendre à faire soi-même grâce à sa propre expérience mais également grâce au partage des autres usagers. Pour moi, les fablabs m’ont permis d’expérimenter, d’acquérir de nouvelles compétences, de croire en mes intuitions, de faire partie d’une communauté de makers mais surtout de me prouver que réaliser « autrement » est possible !
- Quelle est ta machine de prédilection ? Pourquoi ?
La CNC (Computer Numerical Control), une grande machine pour créer du mobilier et des assemblages tout simplement à partir d’un dessin cad 2D.
Ma production s’oriente principalement vers des meubles qui sont réalisés localement en découpe CNC. Cette découpe numérique offre plusieurs avantages : l’économie des matières premières, à travers l’optimisation du dessin de découpe, et la réduction des coûts de production.
Un autre aspect, d’intérêt central selon moi, est la rapidité et la précision de la réalisation des pièces à emboîtement, c’est à dire en tenon-mortaise. Cette technique permet que la conception du design de chaque objet soit faite en lien direct avec son assemblage, qui n’est plus une conséquence, mais un aspect central de l’œuvre.
L’assemblage du mobilier fait donc partie intégrante de sa création : de lui dépend son esthétique, sa résistance, mais aussi la typologie du déchet qu’il générera (pauvre en déchets mixtes) et de la possibilité de le recycler. La guerre aux emballages s’ajoute à ma démarche : en utilisant des techniques d’assemblage passive, je réduis à l’extrême minimum la production de déchets mixtes du mobilier.
- Explique nous un de tes projets.
Autour de ces recherches, j’ai entamé une résidence de deux mois au fablab iMAL où j’ai pu me former à la machine CNC et développer mes prototypes de mobilier, notamment une chaise et une table pour enfant. C’est là que j’ai développé une série de mobilier « boiKousu », dont les pièces sont reliées et fixées uniquement par des cordes (en chanvre). Une technique ancestrale d’assemblage, retrouvée dans l’épave d’un navire grec datant du VI siècle avant J-C (à l’exemple du bateau Gyptis).
Modulable, amusant et instructif, selon l’emplacement des éléments, il est possible de modifier son mobilier et de le faire évoluer.
Ces deux techniques d’assemblage permettent également une chose magnifique : l’interaction objet-individu, enfant-adulte, qui permet le partage, la création de souvenirs et la transmission d’un savoir. L’usager n’est plus passif, il partage autour de l’objet, il crée une histoire avec lui ! Le meuble se transforme ainsi en jeu de construction.
C’est une manière de comprendre et de lire ce qui nous entoure, de créer des souvenirs et des moments de partages.
Pour découvrir les projets et l’univers d’Aria Ann de plus près, n’hésitez pas à suivre ses pages instagram biconolodesign et aria.aan.design ou allez jeter un œil sur son site internet !